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La carrière morale dans la capoeira

Extrait de :  mémoire de master en sport et sciences sociales, Sarah Augsburger, Automne 2010, Université de Lausanne

La capoeira peut être définie à la fois comme une pratique physique ordinaire et comme une pratique qui bouscule les groupements et les divisions sociales ordinaires. D’une part, la condition corporelle et motrice de l’individu s’améliore, son corps évolue, se renforce et s’assouplit pour s’adapter aux mouvements de l’art martial. D’autre part, la capoeira présente une mixité de genre et d’âge que l’on ne retrouve que dans peu de sports : hommes et femmes s’entraînent ensemble, tous âges confondus (à l’exception de la différence entre les cours enfants et les cours adultes).

La pratique est entourée d’une foule d’éléments qui dépassent le cadre de la dépense physique. Ainsi, elle s’effectue en musique, composée d’instruments rudimentaires et de chants en portugais racontant parfois une histoire (réelle ou fictive) ou décrivant le jeu de deux capoeiristes au centre de la roda. La capoeira est également un monde martial fortement hiérarchisé, ritualisé et codifié ; les secrets et les mystères de son fonctionnement ne se révèlent qu’au compte-goutte. L’individu ne se rend compte que progressivement qu’il met les pieds dans un univers bien particulier qui réactive l’histoire des esclaves au Brésil, et que nombre de rituels trouvent leur origine et leur signification dans l’héritage ancestral de la pratique.

Finalement, l’individu évolue du point de vue « moral » ; il entre dans un nouveau monde culturel, qui se dévoile aussi au fil du temps, qui peut changer sa façon de voir les choses dans la vie de tous les jours et modifier son rapport au monde. Il apprend à se comporter selon les codes et incorpore progressivement les normes et les règles explicites et implicites. Qu’il y adhère ou non, il doit s’y conformer pour être perçu et accepté comme participant légitime. De plus, des éléments de la culture brésilienne viennent compléter cette évolution morale : la musique folklorique, très présente dans le monde de la capoeira, ainsi que la langue portugaise, qui est la langue officielle (il n’existe que peu de maîtres brésiliens qui peuvent s’exprimer en anglais par exemple).

Ainsi, la capoeira fonctionne comme un monde bien particulier avec ses codes, sa hiérarchie, ses rituels ou ses communautés ; la différence de cette pratique par rapport à d’autres sports se situe au niveau de son emprise et de ses effets sur les individus. Afin d’être accepté et intégré dans le groupe, l’individu passe par une socialisation spécifique, qui modèle son comportement par rapport aux normes du groupe ; autrement dit, l’individu incorpore des dispositions corporelles et morales qui le rendent socialement adapté au fonctionnement de ce sous-espace social.

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