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Kashiwade

Pourquoi frappons nous dans les mains pendant le misogi waza undo au début des cours d’aïkido ? Voici la réponse.

From : Jean Herbert / Aux sources du Japon : Le Shintô / Albin Michel (1964)

Les cultes individuels comportent naturellement divers gestes rituels. L’un de ces gestes, qui semble se rencontrer exclusivement dans le Shintô, est le battement de mains, comme pour applaudir; son nom générique est hakushu, mais lorsqu’il s’adresse au Kami, il prend le nom de kashiwade. On a proposé pour ce dernier terme plusieurs étymologies; il peut venir de kashiwa, fête ou cérémonie, parce qu’on l’utilisait en ces occasions, ou de kashiwa, chêne de Mongolie, parce que la main de l’homme a une certaine ressemblance avec la feuille du chêne, et il peut aussi signifier simplement « offrande » puisque par exemple le prêtre qui à l’Ise-jingû (grand temple Shintô a Ise) est chargé des offrandes portait le titre de kashiwade-no-osa.

 

L’adorateur, prêtre ou laïc, commence normalement par faire deux profondes révérences devant le temple, ses mains glissant à plat le long de ses jambes. Après quoi, il joint les paumes de ses mains à hauteur de son visage, à une certaine distance devant lui, et il fait glisser la main droite légèrement en arrière; dans ce dernier geste, selon certains prêtres, la main gauche représente l’adorateur et la main droite le Kami, ce qui fait que l’adorateur attire ainsi à lui le Kami. Ensuite, il frappe dans ses mains deux fois, dans certains cas quatre et même huit. Puis il répète les deux révérences, la seconde moins profonde que les autres.

L’explication communément admise est que le bruit ainsi fait attire sur l’adorateur l’attention du Kami. Bien que les autorités ne le nient pas, il est assez clair que ce rite doit indiquer autre chose encore. Si ce n’était pas le cas, on ne comprendrait pas pourquoi il se répète à la fin d’une prière. On pratique d’ailleurs aussi le battement de mains silencieux, shinobi-te, notamment lorsqu’on salue une tombe.

 

Selon Takanobu Senge, le kashiwade fournit un moyen pratique efficace de relier l’homme à Dieu, de mettre l’homme « sur la même longueur d’onde » que Dieu, d’unifier la volonté humaine à la volonté divine et de parvenir ainsi à l’état de gôi, accord, compréhension mutuelle, « dont musubi est l’expression phy­sique ».

L’un des grands réformateurs actuels du Shintô, Masahisa Gôi (son nom ne peut guère être l’effet d’une simple coïncidence), qui groupe autour de lui des disciples aussi nombreux qu’enthousiastes, va beaucoup plus loin. Il a élaboré une méthode de kashiwade extrêmement bruyant, on pourrait dire assourdissant, dont il prétend qu’elle provoque des vibrations « divines »; celles-ci triomphent des vibrations « humaines », « sales » et se substituent à elles, faisant descendre la « lumière blanche » et guérissant les maladies, physiques et autres. Je n’ai jamais eu l’occasion d’assister à de telles guérisons, mais je dois admettre que le kashiwade de M. Gôi — qu’il est tout disposé à enseigner à ceux qu’il juge prêts — crée une ambiance vraiment remarquable.

 

Pour en revenir à des gens moins célèbres, mais sans doute plus représentatifs de la moyenne, un groupe de jeunes hommes d’une trentaine d’années, dont aucun ne manifestait à l’époque de tendance religieuse perceptible, m’affirmait catégoriquement que le son rendu par le kashiwade fournit un indice très sûr de l’état d’esprit de la personne qui le fait; en le faisant le matin, certaines personnes peuvent avoir une idée assez nette de ce que sera leur journée. L’un de ces jeunes gens me confia que dans son enfance, ce kashiwade lui faisait sentir que « Dieu prenait son âme dans Sa main », et les autres hochèrent la tête en signe d’approbation. Il est probable que beaucoup de gens battent ainsi des mains le matin devant le soleil levant.

 

Lorsqu’on fait le kashiwade devant un temple, il est de coutume de faire aussi une petite offrande (saïmotsu) et par exemple de jeter une ou deux piécettes de monnaie dans le saïsen-bako (tronc en bois).

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