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Qui est donc Laozi (Lao Tseu)

Qui est donc Laozi, personnage étrange dont le nom signifie le « vieux maître » ou le « vieil enfant », et dont, disions-nous, le corps ne serait autre que celui d’une femme enceinte ? Il faut, pour se le représenter, considérer ce qu’est le Dao. Le Dao est le principe inconcevable et indicible de la gestation, des cycles, du temps-infini, hors du temps compté. Il est l’indicible maturation sur laquelle on ne peut mettre aucun nom.

C’est là ce qu’exprime le premier chapitre du Daode jing : « Le Dao que l’on peut dire [dao, à savoir « articuler », ce sur quoi on peut discourir] n’est pas le Dao, et le Nom que l’on peut nommer n’est pas le Nom. »  En tant que cet indicible, le Dao est Spontanéité, ziran, il est hunyuan, l’origine du chaos. Or ce Dao, ce hunyuan, est Laozi dans la mesure où, comme le dit Ge Xuan (dans sa préface au Daode jing), « il en incorporait la Spontanéité et c’est pourquoi il est né de ce Vide et avant ce Vide ».

Laozi est donc le corps du Dao. Il y a cependant Dao et Dao, corps et corps.  Car si le Dao est ce Vide dont parle Ge Xuan, c’est au sens où il se fait trou vertigineux, cercle sans bords qui s’encercle, s’étend à l’infini. Ce Vide n’est pas le vide au sens où l’entendent les bouddhistes, le néant. Étant l’origine, yuan, il contient en son sein ce qui est indifférencié — le chaos, hun — et ce qui est différencié — le Un, zhenyi — ; la matrice universelle, hundun, et le Réel, zhen. Le chaos, hundun, cette outre prégnante, est partie de ce temps-infini, hunyuan, partie de cette ombre, xuan, qui les englobe au sens où le Daode jing dit : « Toutes deux ont la même origine, et on les nomme toutes deux xuan, ombre. L’ombre de l’ombre » (chap. i).

Le chaos, partie du hunyuan, est donc là encore Laozi. En tant que tel, il ne peut qu’être archaïque, la forme, le corps, xing, du Dao, de ce temps d’ombre, de ce lieu d’ombre originelle. Hundun, le chaos, contient en son sein, telle une outre, tous les souffles primordiaux, qi, à l’état d’indifférence, de non-désir, wuwei.

The Thatched Hut of Dreaming of an Immortal Handscroll

Or il advint que le chaos éclata, et que les souffles qu’il renfermait surgirent de cette explosion. Ils apparurent à l’état de signes primordiaux, de zhenwen, « écritures réelles », traînées mystérieuses préfigurant l’existence de toutes choses dont ils étaient comme l’origine, ce dont elles se feraient substance. Les souffles, comme par le jeu d’un kaléidoscope, se nouèrent, jie, et se dispersèrent, san, donnant lieu au bianhua, la transformation, la sublimation des éléments dans l’acception alchimique du terme — donnant lieu au temps…

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